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Alzheimer – Les bénéfices de la musique sur le cerveau

« L’intérêt de la musique dans la prise en charge de la maladie d’Alzheimer est indéniable.» Le Professeur Hervé Platel est catégorique, la musique a des effets positifs sur les patients atteints d’Alzheimer. Etudiant l’impact de la pratique musicale sur la mémoire, ce professeur de neuropsychologie à l’Université de Caen nous explique la portée de ses travaux.


 

LECMA-Vaincre Alzheimer : Professeur Platel, pouvez-vous nous expliquer en quoi consistent exactement vos travaux ?

Hervé Platel : «  Mes travaux concernent l’étude de la mémoire humaine à partir de supports artistiques tels que la musique. Ces recherches ont une double finalité. La première est  fondamentale, avec des travaux de neuro-imagerie cérébrale chez des sujets sains musiciens afin de connaître l’impact de l’entrainement musical sur le fonctionnement normal de la mémoire. La seconde finalité est clinique, en étudiant le bénéfice de stimulations musicales chez des patients atteints de maladies neurodégénératives. »

LECMA : Vous avez réalisé des études sur des sujets musiciens et des sujets non musiciens, avez-vous constaté une différence ? 

H.P. : « Oui, il est maintenant clairement démontré que la pratique musicale modifie à la fois le fonctionnement et la structure du cerveau. Ce que nous avons montré d’original, c’est que la pratique de la musique a également un impact sur des régions cérébrales impliquées dans des mécanismes cognitifs de haut niveau telles que l’attention ou la mémoire. »

LECMA : Qu’est-ce que cela implique ? Cela signifie-t-il que faire de la musique pourrait permettre de prévenir la maladie ou de ralentir son évolution ? 

H.P. : « Il y a de plus en plus de travaux épidémiologiques et expérimentaux qui suggèrent que la pratique musicale aurait un effet protecteur vis à vis des maladies neurodégénératives. Non pas que la pratique de la musique éviterait d’avoir une maladie d’Alzheimer, mais elle contribuerait à soutenir une réserve cognitive, c’est-à-dire de la mémoire, à même de retarder les symptômes de la maladie d’Alzheimer. » 

LECMA : Quels effets positifs de la musique avez-vous constaté sur le comportement des patients (sur l’agitation, l’agressivité, l’anxiété etc…)? 

H.P. : « Si la pratique de la musique pourrait « freiner » l’entrée dans la maladie, la musique est également extrêmement pertinente dans la prise en charge de patients Alzheimer à un stade avancée de la pathologie. En effet, nous nous apercevons que chez beaucoup d’entre-eux, la musique demeure le seul canal de communication possible. En observant des patients en institutions spécialisées lors d’ateliers musique ou chant, on constate un éveil cognitif spectaculaire et puissant. Ceci est d’autant plus remarquable que cet éveil est couplé à une baisse des troubles comportementaux. La musique révèle, par ailleurs, que le cerveau de ces patients peut encore mémoriser à long-terme des informations nouvelles, en particulier lorsque ces dernières sont répétées. On peut ainsi parler d’apprentissage implicite ou inconscient, dans la mesure où les patients sont dans l’incapacité de se rappeler des contextes d’apprentissages de ces nouvelles informations et de préciser si celles-ci son récentes ou anciennes. »

LECMA : Comment expliquez-vous cet effet ?

H.P. : « Pour le moment nous n’avons pas d’explications claires de ces capacités résiduelles d’apprentissages. On peut imaginer que l’effet d’exposition répétée à une stimulation sensorielle auditive implique des circuits cérébraux dont l’activité va finir par se consolider et former une trace durable de l’expérience. Mais il n’est pas interdit de penser que ces capacités résiduelles d’apprentissage seraient encore sous-tendues par les circuits habituels de la mémoire. Ces circuits, même s’ils sont très atrophiés en raison des lésions induites par la maladie, continuent d’avoir une activité minimale qui ne se révèle que grâce à l’effet de répétition. Nous espérons que l’étude de neuro-imagerie que nous réalisons actuellement au centre Cyceron à Caen avec des patients Alzheimer à un stade plus ou moins sévère nous permettra de trancher entre ces hypothèses. Nous souhaitons comprendre les mécanismes cérébraux impliqués dans ces capacités résiduelles de mémoire qui étaient jusqu’à très récemment complètement insoupçonnées chez ces patients. »